Il n'y a pas de littérature pour enfants - Critique - Volume E

Les règles suivantes peuvent sembler aller de soi, dès lors qu’un livre est considéré comme le résultat d’une création et non d’une commande. Le domaine de la littérature pour enfants est cependant particulièrement biaisé en la matière : « pas de noir et blanc, de la couleur mais pas trop agressive pour tel âge, pas trop de texte, pas de termes inconnus »... combien de règles, non écrites mais érigées en vérités indépassables, régentent le monde de l’édition pour enfants ? Afin de plaire et d’être compris par les enfants, disent les éditeurs... ce dont on peut douter. D’où ces contre-principes pour une littérature enfantine.

Un livre ne s’adresse pas à une catégorie d’âge fixée, ni à un supposé « stade » de l’enfance (Moi et mon pot, Mon ours va à l’école, Maud est amoureuse...).

Un livre n’est ni outil au service de l’éducation des parents (Je ne veux pas ranger ma chambre, Toto se ronge les ongles...), ni un traité de morale (Pourquoi le frère de Bob il est malade ?, Ma meilleure copine est pauvre...).

Aucun personnage ne doit être soumis à des contraintes d’identification préétablies (âge de l’enfant lecteur, quotidien qu’il côtoie...).

Ni le style des illustrations (trait, couleurs, format...) ni le style du texte (narration, longueur, vocabulaire...) ne doivent être fixés en fonction d’un supposé désir des enfants.

Un livre peut contenir des éléments « gratuits », sans raison narrative apparente ; le mystère et l’inconnu, propices à déboucher sur l’imaginaire, doivent être présents.

Un livre ne doit pas contenir un seul niveau de lecture. Les adultes doivent pouvoir lire l’ouvrage sans avoir l’impression d’avoir « passé l’âge ».

Il y a de la littérature, certains livres exigeant plus d’habitude de lecture que d’autres. Il n’y a pas de littérature pour enfants.